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Les médicaments délivrés sans ordonnance restent en France un marché réservé aux pharmaciens. C’est notamment le cas du paracétamol, molécule essentielle du Doliprane ou du Dafalgan,en raison du risque létal que ferait encourir un surdosage lié à une prise non contrôlée. Absurde, répond l’enseigne E. Leclerc. Dans le décor d’un tournage en public d’une sitcom, le nouveau spot publicitaire d’une quarantaine de secondestourne au ridicule l’interdiction de vendre en parapharmacie du paracétamol.Diffusée depuis le 21 avril, la campagne qui s’inscrit dans la protection du pouvoir d’achat des Français est en réalité un vieux cheval de bataille de l’enseigne.

La vente directe de médicaments est une vieille lutte qui oppose les centres Leclerc aux pharmacies. Le fondateur de l’enseigne, Édouard Leclerc, réclamait déjà la liberté de vendre des produits pharmaceutiques en 1957. Les campagnes de publicité pour obtenir le droit de vendre dans ses parapharmacies des produits comme les couches pour bébé ou le lait maternisé remontent aux années 1980. En octobre 2024, Leclerc revenait à la charge dans une campagne pour distribuer des médicaments sans ordonnance.
 

Il est vrai que la chaîne commerciale peut s’appuyer sur l’exemple de l’Allemagne ou du Royaume-Uni où la vente de médicaments sans ordonnance en dehors des pharmacies est autorisée. Sur 30 pays européens, 16 ont consenti la distribution en grande surface de certains médicaments. L’étude de 2022 qui constate la généralisation de cette pratique précise toutefois que ces produits ne sont pas pour autant en libre-service mais leur vente subordonnée à un âge minimum ou à des quantités moindres par rapport au même médicament vendu en officine.

En France, le marché s’est tout juste ouvert à la vente en ligne de médicaments à condition que les sites appartiennent à des pharmacies, ce qui au fond ne change pas grand chose. Concernant les produits à base de paracétamol ouverts aux marques génériques, l’éventail de prix s’est élargi, les boîtes de huit comprimés pouvant être commercialisées de 80 centimes à un peu plus de deux euros.

En vertu de la réglementation de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (Ansm), les pharmaciens ont l’obligation depuis 2020 de placer les médicaments à base de paracétamol derrière leurs comptoirs.
 

Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France, premier syndicat des pharmaciens d’officine, explique à 20 Minutesque la molécule de paracétamol est considérée en France comme un soin et qu’en limiter la délivrance fait partie de la sécurisation nécessaire de ce type de produits. L’excellente efficacité du paracétamol contre la douleur et la fièvre comprend aussi « un effet dose qui peut être redoutable ». Du côté de l’Assurance maladie, cette molécule « représente la première cause de greffe hépatique [du foie] d’origine médicamenteuse ». Une étude de 2018 révèle que les patients qui ont reçu une greffe ignoraient les risques pour leur foie.

Dans le Moniteur des pharmacies, Laurent Filoche, responsable de l’Union des groupements de pharmaciens d’officine, nous apprend que les pays comme la Suède qui avaient accepté la délivrance de ces médicaments sans ordonnance ont constaté la multiplication des cas de surdosage et sont revenus depuis sur leur décision.
 

La question posée aux centres Leclerc est donc bien de savoir où est l’absurdité.